3 août 2009
UBU-culture
Il faut se pincer pour vérifier qu'on n'a pas rêvé. L'annonce, brute de décoffrage, par le Ministre de l'Agriculture, que les producteurs de fruits et légumes allaient avoir à rembourser des subventions "exceptionnelles", qui leur ont été versées pendant dix ans entre 1992 et 2002, a fait d'autant plus l'effet d'une bombe, que les médias et les commentateurs en ont rajouté, l'important étant de mettre en difficulté le gouvernement*.
Les subventions à l'agriculture, transparentes ou dissimulées, concernent TOUS les pays qui disposent d'un secteur agricole. Que celui-ci soit une survivance coriace de l'histoire de la société, ou qu'il fasse partie de l'économie du pays, par ses exportations de produits bruts ou de produits transformés.
En France, dont l'agriculture et l'élevage ont été les "deux mamelles" selon l'expression de Sully, les activités agricoles sont l'objet des soins attentifs des politiques, tant pour leur poids social, que électoral et économique. Le nombre d'agriculteurs a beaucoup diminué, les exploitations céréalières se sont agrandies, et les rendements des meilleures terres ont été multipliées par cinq. Par contre, les élevages ont peu évolué en taille, en raison de leur besoin de main d'oeuvre, et ils se sont concentrés sur les zones qui lui sont les plus favorables, où la culture des céréales ne leur fait pas concurrence. Le midi s'est spécialisé dans la culture de la vigne et des arbres fruitiers.
La valeur ajoutée de l'activité agricole est faible et instable, soumise aux aléas climatiques et du marché. Le soutien public de l'activité, ne serait-ce que pour assurer la sécurité alimentaire, est indispensable, mais sa répartition laisse à désirer, favorisant les grandes exploitations très mécanisées, employant peu de main d'oeuvre. Les subventions étant proportionnelles aux surfaces, l'inégalité de revenu en est amplifiée. Les utilisations somptuaires des subventions, qui sont le fait des grands céréaliers, n'échappent pas à l'oeil critique des citoyens contribuables. Les fins de mois difficiles des exploitations petites ou moyennes sont beaucoup moins visibles.
De toute façon, s'il est habituel à ces professions agricoles d'appeler au secours pour le moindre aléa, il est de la responsabilité des politiques d'avoir ouvert le Trésor Public, et d'avoir oublié de le refermer. Il serait préférable que toutes les professions organisent leur solidarité face aux aléas économiques, et ne se trouvent pas dépourvues en cas de surproduction, de chute des cours par mévente, ou d'érosion des revenus par perte de production ou hausse des prix de revient. Mais en l'absence d'organisation professionnelle autre que défensive**, il n'est pas possible de rester les bras croisés.
Les aides qui ont été versées il y a plus de dix ans sont l'oeuvre de gouvernements de gauche. J'espère que ce n'est pas une mauvaise raison pour s'en laver les mains. Il y a continuité de l'État, il n'y a pas eu d'obtention frauduleuse; l'État devra "discuter le bout de gras", mais payer le solde après jugement.
Sceptique
*Le gouvernement auquel on a présenté l'addition est "cousu de dettes". "Encore une", a-t-il du crier.
**Le syndicalisme français dans son ensemble n'est que défensif et revendicatif, et dépourvu de moyens lui permettant d'agir directement. Il n'est pas responsable de ses actions.
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