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Sceptique
1 novembre 2009

Un dialogue entre Luc Ferry et Jacques Julliard

C'est par hasard que j'ai pu écouter ce dialogue hier soir. Pour des raisons très explicites, le philosophe Luc Ferry manifestait une forte émotion face au contexte de l'actualité politique. Son pessimisme saisissait divers événements et situations, lourdes de conséquences possibles pour Nicolas Sarkozy et sa majorité.

La dérive personnelle du pouvoir présidentiel, la courtisanerie des interventions de ses ministres et conseillers à propos des divers "couacs" imputés à "la droite", les déboires judiciaires de Charles Pasqua et de Jacques Chirac le désolaient, mais il en défendait la nécessité. "La Justice a montré son indépendance", disait-il avec fermeté.

Ce que j'ai moins compris, c'est son idée que les rats commençaient déjà à quitter le navire sarkozien pris dans la tempête médiatique, et qu'ensemble, ils étudiaient les per spectives d'alternance...dont une au profit de Dominique de Villepin. Ce dernier, selon Luc Ferry, se serait sorti avec avantage de l'affaire Clearstream, et serait en mesure d'être un dangereux challenger en 2012. Il ajoutait que le débat sur l'identité nationale est le rideau de fumée que lance un pouvoir en difficultés, pour occuper la galerie.

Cela dit, il me parait nécessaire de prendre du recul par rapport à ces alarmes.

Le pouvoir personnel est inscrit, sinon dans le texte, du moins dans l'esprit de la constitution de la Vème République. Le Général de Gaulle en a largement usé, et ses contestataires ne s'y sont pas trompés. Ses successeurs ont apporté leur touche personnelle à l'exercice de leur présidence. François Mitterand, contempteur de la Constitution gaullienne, ne l'a plus contestée, sitôt élu. 

Nicolas Sarkozy a poussé de quelques crans cette logique. Sans surprendre quiconque. Il l'avait annoncé, et cette dynamique personnalisée a été validée par les électeurs. Sa challengère aurait fait de même, il n'y a aucun doute à avoir sur ce point. Parce que, dans la situation de blocage de notre société, c'était, et ça l'est toujours, une nécessité.

Nicolas Sarkozy s'expose en permanence aux critiques, aux déçus, aux frustrés, aux jaloux, aux opposants "structurels" et "circonstanciels". Les insultes et les moqueries abondent. Responsable de tout, il assume tout, ne passe jamais la patate brûlante à quiconque. Ses adversaires ont les yeux rivés sur les sondages. Lui, peut-être aussi, mais il ne paraît pas en tenir compte, assumant son impopularité. N'est-il pas normal que ses ministres réaffirment leur solidarité, leur fidélité? D'un point de vue moral, ça se défend. Les mutineries ne font pas avancer les bateaux plus vite, vers le meilleur port.

Quant à son "challenger" auto-proclamé (entre autres*), Dominique de Villepin, je ne comprend pas comment on pourrait oublier les erreurs qu'il a conseillées et celles qu'il a faites en personne comme premier ministre. Sa défense dans le procès "Clearstream", consistant en un déni absolu, de A à Z, en dépit des autres témoignages, est LA méthode adoptée par tous les prévenus, de nos jours, même par ceux qui ont semé leur ADN sur leur passage sanglant. Sa posture ne suffit pas à faire de lui un innocent.

L'indépendance de la justice l'est par rapport au pouvoir politique, et c'est évidemment une bonne chose. Mais le juge d'instruction, appartenant à l'humanité, l'est-il par rapport à sa conviction intime, à sa propre sensibilité politique, philosophique, religieuse? Ces convictions préalables, et/ou celles des enquêteurs, ne sont elles pas à l'origine de TOUTES les erreurs judiciaires qui se produisent en France, un peu trop régulièrement? Il est reconnu par bon nombre de magistrats, y compris d'anciens juges d'instruction, que la solitude de ce professionnel est un grave point faible.

Toute la glose qu'on peut consacrer à la vie politique en France n'apporte de solution à la situation de fait qui porte en elle la logique de l'INACTION TOTALE. La coupure de notre peuple passe, avec une petite marge de fluctuation, en son milieu. Cinquante, cinquante. Notre pays est mathématiquement ingouvernable. Seul l'artifice constitutionnel de la Vème République et son système électoral majoritaire permettent de confier le pouvoir à un vainqueur, à partir d'un écart de nombre de voix de quelques pour cent. La situation d'aujourd'hui peut effectivement être interprétée comme l'annonce d'une alternance inéluctable. Elle a une ancienneté proche de deux ans et demi! En quatrième République, on en serait déjà au cinquième ou sixième gouvernement! Comment peut-on être nostalgique d'une telle impuissance?

Sceptique

* Il y a en permanence, en France, à peu près vingt-cinq millions de présidentiables, qui n'osent pas le dire.

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