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Sceptique
22 novembre 2009

"Pas de liberté pour les ennemis de la liberté"?

On sait combien cette proclamation de Louis de Saint-Just a été mal reçue par ses contemporains, et restée gênante pour leurs descendants, même convaincus du bien fondé de la Révolution et de l'instauration de la République. 

Il y avait dans la pensée de Saint Just une dérive dictatoriale, sacralisant l'interprétation des jacobins et de leur meneur, Maximilien Robespierre. Les adversaires des jacobins n'étaient pas des défenseurs de la monarchie. Ils n'étaient pas ennemis de LA liberté, mais de celle, restrictive, des chefs de la Terreur.

Comment peut-il y avoir des ennemis de la liberté? Cette valeur n'est elle pas défendue, ou espérée, par tous les peuples du monde?

Et bien oui, il y en a, et même, chacun de nous l'est un peu, de temps en temps. Dans un premier mouvement, nous n'acceptons pas tous les modes d'expression de la liberté. Nous en réprouvons certains, et nous disons, à nous-mêmes ou à d'autres: "il faudrait interdire ceci ou cela." Notre esprit, imprégné d'un catholicisme qui met ses principes au dessus des lois et des contingences humaines, en a gardé ce réflexe:"la liberté, oui, mais pour quoi faire?" ou même, ce risque de dérive:" tout ce qui sera permis deviendra obligatoire!"*

Mais il existe des individus et des idéologies qui sont ouvertement ennemis d'une autre liberté que la leur.

Les premiers, comme les pédophiles, les pervers, et les paranoïaques, considèrent comme nulle et non avenue la liberté de leur proie. Leur prise de possession est totale, sans réserve. Ils disposent, en toute bonne conscience, de la vie de ceux dont ils décident qu'ils ou elles leur appartiennent. 

Les secondes, représentées par leurs militants actifs, mettent leur idéologie, de quelque nature qu'elle soit (religieuse, politique, sociale) au dessus de toutes les lois ordinaires. La liberté définie par ces lois est leur ennemie. La seule liberté permise est l'adhésion à la valeur supérieure désignée. La guerre contre la liberté "abstraite" est légitimée.

Cette question se pose de nos jours beaucoup plus souvent qu'on ne le pense. Les sociétés libérales sont exposées à des attaques en proportion du degré de liberté qui constitue leur minimum. Elles sont toujours surprises lors de ces attaques, et doivent prendre des dispositions restrictives de la liberté pour mieux la défendre? Ce qui n'est pas sans poser des problèmes éthiques peu supportables.

Il y a en effet une contradiction entre la liberté et les mesures de police à prendre contre ses adversaires: fichage, écoutes, filatures, vidéo-surveillance. Les fichages ont particulièrement mauvaise réputation. Leurs critères d'inclusion sont préventifs et donc discriminatoires au sens propre du terme. Les défenseurs de la liberté se mobilisent contre les projets de perfectionnement de ces fichiers.

Dans les pays imprégnés de tradition libérale, la garde baisse vite. L'épisode récent de Fort Hood, aux États-Unis, où un officier musulman en partance pour l'Irak a tué à l'arme automatique treize personnes, civiles et militaires, présentes dans ce camp d'entraînement et de préparation, a surpris tous ceux qui n'étaient pas informés des états d'âme du meurtrier. L'enquête a montré que le FBI avait l'oeil sur le médecin militaire, en raison de ses relations avec un imam fanatique, et de certaines de ses présentations à l'occasion de conférences. Il était déchiré entre son statut de militaire américain et sa religion musulmane. Le FBI, par un réflexe de respect humain, n'a pas signalé ses constatations au commandement militaire. Le choix de l'homme a soudain basculé du côté de la religion. Entre temps, aussi, l'obsession anti-terroriste d'une Amérique frappée durement le 11 Septembre 2001, avait faibli, sous le poids moral des excès de la répression. 

En France, la division entre les tenants de la sécurité et ceux des libertés a le même trajet que la division politique. Ce qui oblige la majorité à travailler dans une grande discrétion, confinant à la dissimulation, toute demande de mesures adaptées à la menace étant attaquée au nom des libertés. Nous avons la chance, pour combien de temps, de ne pas subir d'attentats. La vigilance des professionnels de la sécurité y est sûrement pour quelque chose.

Sceptique

*La contraception, l'IVG, devaient entraîner l'effondrement de la natalité, le pacs serait le statut de tous les couples, et toutes les femmes seraient plaquées. L'euthanasie permettra la mise à mort de tous les vieux, par cupidité. J'en oublie sûrement.

Note du 27 Novembre 2009: Une information en provenance du Mexique a sa place dans cette réflexion sur la liberté des personnes et leur dénégation criminelle: dans ce pays, le machisme a pris des proportions effarantes, et la sécurité des femmes y est particulièrement précaire. Pour éviter les pincements de fesses et autres attouchements ciblés, les rames de métro sont interdites aux hommes aux heures de pointe. Depuis dix ans. Et ce n'est pas encore suffisant. 67 bus sont réservés aux femmes. Les hommes n'y sont admis qu'accompagnés d'un enfant. Les viols de femmes dans les taxis, par leur chauffeur lui-même sont d'une fréquence sous estimée. Ce qui a favorisé la création de taxis conduits par des femmes et réservés aux femmes, de couleur rose bonbon. Comme l'explique une responsable, "ces initiatives répondent à un vrai besoin, dans une société où les hommes pensent que le corps des femmes leur appartient." 

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Commentaires
S
Il ne manque pas de faits historiques et de paroles malheureuses qui vous donnent raison. Il est vrai, aussi, que la liberté peut être dérangeante pour ceux qui, dans l'instant, n'en ont pas un besoin urgent. Elle suscite parfois le sentiment que son objet pourrait devenir obligatoire...;et cesser d'être une liberté. Elle s'arrête, pour chacun, où commence celle des autres, et ne doit pas être confondue avec la licence. Dans ce cas précis, il n'est pas interdit d'interdire.<br /> <br /> Vous avez raison de la sentir continuellement menacée, remise en cause, au nom de religions ou d'idéologies. Mais comme on défend sa vie, non seulement de la menace des autres, mais des maladies, <br /> <br /> on peut et on doit défendre la liberté, dont on peut avoir besoin un jour. Et on finit toujours par savoir comment vivent ceux qui en sont privés. On ne s'y ferait pas.
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A
Ont parle d'un mot, la Liberté dont je n'arrive pas a savoir ce qu'elle recouvre. Généralement ceux qui parlent de Liberté sont ceux qui veulent qu'ont pense comme eux, et sont surtout pour leur Liberté a eux. De plus on ne peut nier que nous sommes soumis a certains déterminismes, qu'ils soient sociaux ou biologiques, ou plus globalement physiques, qui font qu'ont se croit Libres alors que ce n'est qu'une illusion. Sans oublier que des criminels s'éxonèrent de leur faute et irrespect des autres sous prétexte de Liberté (Liberté de violer par exemple au nom du Jouir sans entraves). Je suis sceptique sur un concept aussi vague, aussi abstrait que la Liberté, d'autant que ceux qui s'en réclament sont souvent ceux qui abolissent celle-ci (si tant est qu'elle puisse existée) au prétexte de la défendre. Je suis aussi sceptique sur l'abolition de la peine de mort, quand des Robespierres qui étaient contre ne se sont pas privés de l'appliquer eux même contre leurs adversaires, et puis quand la peine de mort est abolie par l'état, elle est appliquées par les criminels et ceux qui se disent Révolutionnaires, ce qui fait que celle-ci n'est pas abolie dans les faits mais simplement privatisée. Quand a l'Egalité, ont ne la voie pas dans la Nature sauf au niveau des clones et des jumeaux et encore... Les grands principes ne servent a rien, a part a cautionner une politique, mais ce ne sont que des slogans, jamais une réalité.
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S
Quelle est la limite de la discrétion en démocratie? Elle est attaquée dans son principe par les puristes de la démocratie, et elle est le gibier préféré des journalistes. C'est pourquoi les grandes lignes des intentions du pouvoir doivent être claires.<br /> Par contre, le travail des services de police spécialisés (dans le terrorisme, la sécurité du territoire) doit être préservé par le secret sur l'identité de ses membres et sur ses moyens.<br /> <br /> @Éric : je dirais plutôt: "la liberté n'est pas la licence." Et il faut sans cesse rappeler qu'elle "s'arrête où commence celle des autres".
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E
La liberté n'est pas le libéralisme.<br /> <br /> Et de fait, la liberté ne peut être un absolu.<br /> <br /> Malgré ce qui a pu s'écrire en 68 sur les murs de la Sorbonne, il y a une liberté d'interdire.
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P
travailler dans la discrétion n'est pas répréhensible; d'autant plus que la discrétion n'est pas le secret. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement ne procède pas plus souvent ainsi sur certaines questions brûlantes.
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Sceptique
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