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Sceptique
18 novembre 2010

L'intime conviction est elle une preuve?

Frappé par la différence entre l'énoncé de Charles Millon, qui parle d'intime conviction (qu'il y a eu des rétro-commissions à l'occasion de la vente de sous-marins au Pakistan dans les années 1995) et l'exploitation médiatique, politique, mais aussi émotionnelle, par les familles des victimes de l'attentat de Karachi, en Mai 2002, je me mets au clavier.

Les leaders de l'opposition "somment" le président de la République de venir s'expliquer sur les soupçons de rétro-commissions illicites encaissées par des personnalités du RPR, alors en cohabitation avec le Président Mitterand, depuis la perte de sa majorité par le président, en 1993.

Les sous-marins n'étant pas fabriqués à la même cadence que les boites de sardines, cette vente avait été préparée par la DCN, préoccupée par son plan de charge, mais pas du tout par la rentabilité à prévoir de l'opération*. Ce n'était pas par passion de la vente d'armes, mais pour faire tourner les chantiers navals militaires. De telles ventes sont difficiles, dans un contexte de concurrence toujours déloyale. Des "commissions", appelés ailleurs "bakchichs", sont versés à des intermédiaires, choisis par les connaisseurs, au carnet d'adresses bien garni. Les intermédiaires sont redevables de rétro-commissions aux personnes qui les ont recommandés.

Ce que je raconte ici, ce n'est qu'une croyance, même si le mécanisme est vraisemblable, car jamais,  à ma connaissance, ces turpitudes ne sont apparues au grand jour, sous formes de faits, de preuves, d'aveux. S'ils existent, ce sont des secrets bien gardés. Simplement, "on" imagine mal que ces contrats se passent dans une quelconque transparence, comme dans une boutique ordinaire. Si régulièrement, des dossiers sont ficelés, des personnalités sont ciblées, trainées devant les tribunaux après démission de leurs responsabilités politiques, les instructions s'enlisent, les procès trainent en longueur, les jugements sont fragiles, et les appels et recours ajoutent des années, qui ne font pas gagner en clarté. 

On finit par se poser la question: qu'est-ce qui est le plus important dans l'ouvrage  d'un politique? Faire travailler les industries nationales, faire valoir le savoir faire, ou refuser le marché au nom de la vertu? Pour les politiques, un chantier naval vaut bien un péché. Pour les juges, il ne saurait en être question. relativiser la morale ne fait partie de leurs paramètres.

Dans cette affaire des sous marins pakistanais, on a placé sur le même fil ces possibles commissions, une somme non identifiée dans les comptes de campagne du rival Balladur, et l'attentat de Karachi, sept ans plus tard. Cerise sur le gâteau, le choix politique de Nicolas Sarkozy, à l'époque, en faveur d'Édouard Balladur, est porté à son passif, ainsi que sa charge de ministre du budget.  

J'ai été frappé, un fois n'est pas coutume, par la réaction des internautes à ce qu'ils ont entendu, et à ce qui en a été fait ensuite. Pour presque tous, une intime conviction n'est pas une preuve. C'est d'ailleurs pour ça qu'elle a mauvaise réputation. Elle a longtemps tué.

Sceptique

* Un rapport de la Cour des Comptes, établi au début du deuxième mandat de Jacques Chirac, malmène essentiellement les responsables de la DCN pour les manquements à leurs obligations d'informer les contrôles financiers, et au delà, les responsables politiques, des pertes financières à prévoir pour cette vente de sous-marins classiques. Seule les préoccupait la charge de travail des chantiers qu'ils dirigeaient. Ce fut, au final, une très mauvaise opération commerciale, une vente à perte. Le rapport montre la légèreté, en matière comptable, des services de l'État.

 

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