Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Sceptique
12 août 2012

L'École du crime

Une affirmation péremptoire peut être acceptée sans histoires si elle vient d'une autorité légitime. C'est le cas de celle de Xavier Lameyre, magistrat, vice-Président de l'application des peines au tribunal de Paris:"La prison est toujours l'école du crime."

C'est, en effet, à l'école qu'on apprend l'essentiel de l'instruction, ou d'un savoir quelconque: la conduite automobilie à l'auto- école, la musique à l'école de musique.

De l'affirmation de Xavier Lameyre on serait fondé à déduire que les criminels et délinquants sont d'abord entrés en prison, à leur demande ou sur concours, et en sont sortis diplômés. À partir de quoi, ils ont mis en pratique leur savoir, amélioré leur expérience, et embrassé la carrière d'auteurs de crimes et délits. Ils font de longs et fréquents stages en prison. À intervalles irréguliers, ils en partent pour des mises en application, et y retournent à leur terme. Dans ce métier, "on" n'en saurait jamais assez, et rien ne vaut la formation continue!

C'est bien ce ce que veut dire le magistrat: la prison n'est pas, contrairement à ce qu'on en pense, une punition infligée par la société et une mise temporaire hors d'état de nuire, mais un stage de remise à niveau et de perfectionnement. La "clientèle" de ces professionnels pense la même chose, d'ailleurs, mais avec nettement moins de distance. Xavier Lameyre, ajoute, c'est l'essentiel de son propos, que la politique sécuritaire de Nicolas Sarkozy, qui a cherché à augmenter la fréquence et la durée des emprisonnements, est l'équivalent d'une promotion à la distinction d' École Nationale Supérieure du Crime. C'est cet élitisme, profondément inégalitaire, qui pose problème, dans ce domaine, comme dans tous ceux qui se sont vus attribuer cette appellation orgueilleuse*.

La société des hommes a-t-elle besoin de cette nouvelle science du prélèvement de biens et d'existences, entrant en concurrence avec l'École Nationale d'Administration, qui envoie ses meilleurs élèves à Bercy, et les diverses écoles militaires, couronnées par l'École de Guerre? 

N'y a-t-il pas une opportunité, à la faveur du "changement", de mettre fin à cette branche de l'enseignement supérieur, qui n'a d'ailleurs pas la cote. Il est patent que ses diplômés ont du mal à l'embauche, et sont souvent contraints au statut d'auto-entrepreneurs, de "fee-lances", ou, au mieux, de sociétés de fait. S'ils ont l'avantage de ne payer d'impôts qu'à partir d'un chiffre d'affaires conséquent, les risques du métier, la méfiance de la clientèle, sont leur lot commun.

Par la même occasion les professions chargées du recensement et du contrôle d'activité des diplômés de l'École du crime, pourraient voir leur recrutement et leur coût de fonctionnement se réduire au strict minimum, celui de la délinquance routière**, qui s'apprend et se pratique "sur le tas", ne connait pas la crise, est défendue par une large majorité.

Un sacré soulagement pour Madame la Ministre Christiane Taubira.

Sceptique

*Qualificatif orgueilleux que ne se sont pas attribués l'École Nationale de la Magistrature, non plus que l'École Nationale d'Administration.

**Là encore, la criminalisation excessive de la délinquance routière aboutit, souligne notre magistrat humaniste, à appliquer la prison à d'honnêtes travailleurs, accablés par les demandes urgentes, et contraints de ne pas respecter les limitations de vitesse. Perdant par paquets de deux ou trois leurs points de permis de conduire, empêchés par leurs tâches de consacrer du temps à une formation permanente à l'Auto-École, ils se font prendre à conduire sans permis. La prison, dans l'état actuel de la Loi, leur est promise. Intolérable!

Source: "Le Monde" daté du 11 Août 2012, "culture & idées"p.3

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
D
Ce que suggère ce monsieur, c'est que soient supprimées les peines pour tous les crimes et délits, pour interrompre la transmission du savoir faire!
Répondre
Sceptique
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité