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Sceptique
18 novembre 2013

LA FAIBLESSE DES PUISSANTS FAIT LA FORCE DES FACTIONS.

Je ne suis, ni un juriste expert en droit constitutionnel, ni un professionnel de la politique. Je ne suis qu'un témoin attentif et sensible de plus de soixante-dix ans de notre histoire. Et je suis donc inquiet de la crise morale, de confiance, de citoyenneté, qui fissure plus que jamais le peuple français, pourtant tiraillé depuis des siècles, par des forces centrifuges.

Ma vision de notre histoire, c'est que le rassemblement de notre peuple n'a été réalisé, d'abord, que par des envahisseurs, des conquérants, nous imposant leurs lois ou leur organisation politique.

Par la suite, sa cohésion a toujours été plus grande sous l'autorité de pouvoirs forts que de pouvoirs faibles. Lesquels ne tardent jamais à réveiller nos délices gauloises, notre goût pour les luttes intestines. Dont chaque partie prenante souffre, mais en utilisant la commodité d'accuser "les autres".

En 1946, sortie vivante et réhabilitée de la deuxième guerre mondiale, mal commencée pour elle par une défaite humiliante et une occupation par le vainqueur allemand pendant quatre ans, la France a eu le choix entre deux options constitutionnelles: un système présidentiel, proposé par le Général de Gaulle, refusé par référendum, et un système parlementaire, accepté de la même manière.

Ce système, faible et instable, a fini par se briser sur une difficulté trop grosse, la Guerre d'Algérie, particulièrement clivante. Le Général De Gaulle a été rappelé, et il a fait adopter une constitution plutôt présidentielle, surtout en raison de l'élection du président de la République au suffrage universel. Malgré la nostalgie du poker menteur qui avait précédé, les fidèles de la IVème République ont, chaque fois qu'ils ont reconquis le pouvoir, trouvé du bon à ces institutions efficaces, permettant l'exercice du pouvoir démocratique, sans le risque d'être désavoué un mois plus tard.

Mais si François Mitterrand, élu en 1981, a pu rendre supportable sa démagogie initiale, en tenant fermement les commandes,  et en changeant de cap dès que nécessaire, son héritier intellectuel, François Hollande, s'avère impuissant à maitriser l'indépendantisme de ses ministres, et à leur faire élaborer une politique nettoyée de ses foucades idéologiques. Lesquelles ont précipité la dégringolade de notre économie fragilisée par la crise, dans un premier temps, et réveillé tous les conflits d'intérêt entre les parties de la France et son État unificateur. 

Déjà, en 1981, la Gauche rassemblée par François Mitterrand s'était préférée "girondine", plutôt que "jacobine", comme l'était devenue la Révolution de 1789. Le jacobinisme, reprenant les outils de Louis XIV, contraint qu'il était de faire face à une guerre étrangère, qu'il avait déclenchée, et à des factions armées, fidèles au Roi ou à l'Église, avait opté pour une vision "une et indivisible", de la République. Pouvant justifier l'usage de la force. 

Malgré des désaveux électoraux réguliers, mais toujours aussi éphémères, Mitterrand avait pu tenir quatorze ans. Dont dix de pouvoir de gauche, et quatre de cohabitation avec la droite. Une manoeuvre idiote d'un Jacques Chirac pas aidé, ramena la gauche au pouvoir pendant cinq ans supplémentaires. Dont l'héritage pèse toujours très lourd.

Commencée pendant les années Mitterrand, la décentralisation de la France, renversant la hiérarchie des pouvoirs non régaliens entre l'État et les Régions, héritières des Provinces, fut complétée sous la responsabilité de Jacques Chirac. Ses conséquences se révèlent particulièrement pesantes dès que le pouvoir exécutif, incarné par le président de la République, se fait faible, parce qu'il se préfère faible. La tentation de lui porter des coups de sabot s'exacerbe. Mais on a pu constater que face à un Président voulant s'imposer, les Régions, sûres d'elles-même, de leur bon et nouveau droit, se cabrent. D'autant plus que les élections locales qui choisissent leur majorité drainent les votes-sanction. Lors de la Présidence de Nicolas Sarkozy, la quasi-unanimité des Régions s'opposaient au gouvernement. La Bretagne y tenait une bonne place.

Réveillés par une débacle de leur économie, les bretons ont frappé les premiers. La goutte qui a fait déborder le vase a été la mise en application, en plein marasme, d'une écotaxe concoctée par la conférence écologique du précédent quinquennat, mise au placard en raison de la crise, et sortie de la naphtaline par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault..à la demande de ses alliés verts?

Surpris par tant d'ingratitude, et sans solution dans les mains, le Gouvernement a pris tous les coups possibles, pendant de longs jours. Les actes d'incivisme, de destruction d'ouvrages publics, débordant le cadre des dispositifs destinés à calculer les taxes dues par les transporteurs, se sont étendus à ceux qui cherchent à dissuader les citoyens libres, de tuer, dans la jouissance de la vitesse, d'autres citoyens non moins libres. Le droit de tuer devrait être reconnu, comme les autres. La solution, mettre des gendarmes auprès de chaque radar encore intact, de chaque portique consacré à l'écotaxe, ne peut être durable.

L'exemple, semblant payant, des bretons, s'est répandu dans toutes les directions, à l'ensemble du territoire. Si le mécontentement était une industrie, nous sortirions vite de la crise. Au contraire, il accable l'État de demandes de subsides divers. Tout en refusant de lui payer l'impôt. Il n'y a pas lieu de s'en étonner. C'est une vieille histoire.

En application de la Constitution, le Président de la République doit reprendre en mains la situation, restaurer l'autorité de l'État sur les citoyens et les collectivités territoriales. La noblesse de ses sentiments est respectable, mais elle ne lui vaudra aucune reconnaissance. Conservant sa majorité qui lui ne fera pas défaut, obligée et solidaire, comme toute majorité de la Vème République, il a à sa disposition le droit de former un autre gouvenement, de taille réduite, composé d'amis sûrs et de quelques experts apolitiques. Le silence, le dévouement à la cause publique, l'altruisme, l'abnégation, seront les vertus à rechercher. La résistance à la pression des lobbys, des intérêts partisans, ou particuliers, la primauté d'un intérêt général défini par le raisonnement, et non par les passions, seront les principaux outils d'un tel gouvernement. Les termes de Salut Public se présentent. Pourquoi pas?

Parmi les réformes qu'un tel gouvernement aura à accomplir, la restauration des droits de l'État ne sera pas la moindre. Voir d'abord ce qui marche moins bien depuis la décentralisation, et en retirer la délégation aux collectivités locales. Réduire, on en parle en vain depuis des années, le "millefeuille" politique et administratif, inefficace et ruineux, qui s'est constitué grâce à une fuite en avant inexorable.

Il est tout à fait possible de se passer des services d'une dictature, de ne pas en prendre le risque*, pour arriver à ce résultat. 

Sceptique

*Le totalitarisme est au coeur de toutes les bonnes idées, car souvent considéré comme le meilleur moyen d'assurer leur réussite.

 

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Commentaires
S
J'en conviens. Les partis profitent du clivage obtenu en "montant" leurs partisans contre leurs adversaires. Mais pourquoi les citoyens ne sont-ils pas conscients de ce qu'ils sont "instrumentalisés"? Ne savant pas ce qui se passe ailleurs, il m'arrive de douter de l'aptitude de l'esprit français à une vraie démocratie.
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P
Si les partis de gouvernement ne se discréditaient pas aussi systématiquement les uns les autres ils pourraient espérer être mieux respectés par les Français.
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P
Brillante analyse. Merci
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Sceptique
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