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Sceptique
11 juin 2014

IRAK, LE COMMENCEMENT DE LA FIN.

Ce qui était prévisible est arrivé  rapidement. L'Irak, envahi, occupé,  puis évacué par les américains, n'a pas tardé à se disloquer, et à libérer les vrais rapports de forces, qui ne sont ni politiques, ni ethniques, mais religieux. Le nord est sunnite, le sud, chi'ite. Le nord-est, est, aussi, sunnite, mais avant tout kurde.

La région, le bassin du Tigre et de l'Euphrate, a d'abord été le coeur de l'islam triomphant, sunnite, du Califat de Bagdad. Sa puissance et son autorité spirituelle se sont étendues jusqu'au Maghreb et Al Andalous, la péninsule ibérique conquise en l'an 800 de notre ère. L'empire ottoman l'a conquis, et a repris les mêmes influences politiques et militaires, à l'exception de l'Espagne, reconquise, et du Maroc, indépendant.

Le recul de l'Empire ottoman a été continu à partir du 16ème siècle, pour s'achever en 1918 avec la défaite des empires centraux, Allemagne et Autriche-Hongrie, entrainant avec eux leur allié turc. Les anglais, alliés et conseillers des états arabes, l'avaient pris à revers, et la Grande-Bretagne s'est assurée le contrôle du sud du moyen orient, plaçant ses alliés hachémites à la tête de royaumes taillés selon ses intérêts*.

La seconde guerre mondiale a épuisé l'Empire britannique, et sous la pression "amicale" de l'allié américain, la Grande Bretagne a laissés ses rois se débrouiller. La région s'est déstabilisée avec la guerre israélo-arabe. En Irak, les généraux du Parti laïc, le Baas, ont renversé le roi. Saddam Hussein est devenu le dictateur que l'on sait, soummettant l'ensemble du territoire légué par le protecteur anglais, grâce à son armée, majoritairement sunnite. Mais le critère religieux n'était pas au premier plan, alors.

La suite, les attentats de Septembre 2001, ouvrant l'ère d'Al Qaeda, dont l'armature était une version fanatique du sunnisme, la réaction américaine, faite de vengeance, mais aussi d'une éradication du nouvel adversaire, conduisirent les américains à chercher tous les prétextes d'envahir l'Irak, d'abattre le régime de Saddam Hussein, accusé de couvrir l'ennemi, chassé de son nid afghan. G.W.Bush déclencha l'invasion, qui aboutit à l'occupation de l'Irak, malgré sa résistance. Saddam Hussein avait distribué à son peuple toutes ses armes, qui servirent à une guerrilla généralisée, mais aussi aux premiers réglements de comptes entre chi'ites et sunnites.

Le pouvoir américain utilisa cette rivalité en garantissant à la communauté chi'ite le pouvoir que son nombre lui attribuait. Quant à l'adversaire commun, les kurdes, ils se virent garantir une protection aérienne contre toute opération hostile, d'où qu'elle vienne.

Le chi'isme est une branche de l'islam séparée très précocément de l'islam "orthodoxe". Il est honni et méprisé par les sunnites, en raison de son évolution "idolâtre", à leurs yeux. La démocratie imposée par l'occupant américain, profitant à la communauté la plus nombreuse dans la partie sud du pays, a creusé irrémédiablement le fossé entre l'orthodoxie et et le schisme. 

Depuis que les américains sont partis, la guerre religieuse s'est exacerbée, les morts se comptent par dizaines chaque jour. Et depuis quelques semaines, les forces sunnites du nord, fanatisées par Al Qaeda, se sont mises en mouvement pour reconquérir le sud. L'armée chi'ite s'effondre, les villes du centre tombent. 

Et cet Irak "officiel" est, jusqu'à ce jour, abandonné à son triste sort. Les États-Unis ne semblent vouloir bouger**. Une puissance chi'ite comme l'Iran, bien que mêlée à la guerre syrienne, allée "naturelle" d'un Irak gouverné par des chi'ites, n'est pas intervenue. Le pourait-elle?

Je n'arrive pas à imaginer un retour à l'Irak d'avant 2003. La dislocation d'un état artificiel, fabriqué par les vainqueurs de la première guerre mondiale, me semble en marche, avec les horreurs propres aux guerres de religion, et/ou, civiles. Seuls les kurdes irakiens pourraient rester en dehors et y gagner leur indépendance. Mais ce n'est pas sûr, tellement cette éventualité ressoude les forces hostiles aux kurdes.

Cependant, si le fanatisme religieux est un atout dans le combat, il est rien moins que sûr qu'il garde son influence dans un Irak repris par les sunnites du Nord. Les officiers bassistes de Saddam Hussein sont présents dans la coalition, et ils ont sûrement en vue de reprendre le pouvoir, de restaurer un Irak le plus ressemblant à celui qui fut brisé en 2003. Dès qu'on prend la mesure du fossé qui sépare les belligérants, ce ne sera pas pour bientôt.

Sceptique

* La Jordanie, la Syrie (coup d'état d'Hafez Al Assad), et l'Irak.

**Une information tombée depuis, révèle que les États-Unis pourraient tenter d'arrêter, par des frappes aériennes, l'avance des EILL, les sunnites du nord.

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Commentaires
S
Toutes les grosses têtes qui représentent le monde "moderne", comme Obama, Fabius, Lavrov, exigent des belligérants (chi'ites, sunnites, et kurdes) qu'ils s'entendent, pour "sauver" l'unité de l'Irak. Ou "ils" n'ont rien compris, ou ils font semblant. Dans quel but?
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S
L'établissement de la démocratie était "le bénéfice secondaire", " le lot de consolation", mais pas le but de la guerre. Pour la première, ce fut le coup de force de l'Irak sur le Koweit et ses richesses pétrolières. Pour la seconde, le projet prêté à Saddam Hussein de reprendre la guerre, "avec des armes de destruction massive", par solidarité avec Al Qaeda. C'était du "tout faux". Le but était le contrôle de la production pétrolière. Le résultat est: ni pétrole, ni démocratie.
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P
Merci pour cette mise en perspective historique.<br /> <br /> <br /> <br /> Mais que peut-on penser rétrospectivement des guerres d'Irak pour y établir la démocratie?
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Sceptique
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