LA MORT EST ELLE UNE VICTOIRE...DE LA MORT?

 La glose qui accompagne la mort de Cassius Clay, ou Mohamed Ali,  le célèbre boxeur américain, donne à réfléchir. C'était une célébrité, plus politique, plus américaine, que sportive, malgré ses exploits. D'abord parce que lui même a revendiqué d'être autre chose.

Partie prenante, il a mis tout son poids au service de la lutte pour l'égalité des droits civiques des noirs américains. Ce qui lui a valu des mesures de rétorsion humiliantes, annulées par un jugement de la Cour Suprême.

Il s'est converti à l'islam, dans le même contexte de révolte et de provocation. Car les reproches qu'il pouvait faire à un christianisme hypocrite, concernent tout autant l'islam, et toutes les civilisations de l'ancien monde. La condamnation et l'abandon de l'esclavage font partie des prises de conscience des hommes, en progrès continu.

Ce qui me fait réagir, ce sont les commentaires qui ont accompagné cette mort, prématurée selon les nouveaux standards. Sa maladie de Parkinson avait peut-être un rapport avec le métier qui a été le sien, mais ce n'est pas sûr. La boxe laisse des lésions des hémisphères cérébraux. À ma connaissance, il n'a jamais eté mis K.O. La maladie de Parkinson est liée à une dégénérescence des noyaux gris centraux. Or, la dégénérescence est le phénomène global qui affecte notre corps vieillissant, moins bien, et plus lentement, réparé par la "régénérescence", le phénomène contraire. La mort est la défaite de la vie, des "pulsions de vie", non la victoire de la mort, de la "pulsion de mort"*. 

Une lutte pour la vie, ou, de la vie, a un sens quand la maladie ou la blessure viennent de l'extérieur. Le cancer en fait partie, car il provient d'une cellule qui s'est rendue "étrangère", inaccessible aux mécanismes de régulation et d'identification de notre corps. Notre système immunitaire a été mis en échec.

La dégénérescence est le mécanisme commun du viellissement. Nos organes vitaux sont affectés en dernier, sauf exceptions. La particularité du système nerveux central est sa faible capacité de régénérescence, exceptionnellement sollicitée. Les neurones ne se renouvellent pas, comme les autres cellules de notre corps. Leur dégénérescence entraine des infirmités, non mortelles par elles-mêmes.

Il est d'ailleurs précisé que c'est un épisode infectieux pulmonaire qui a précipité la défaillance de l'illustre boxeur. La défaite de la vie.

Sceptique

*La "pulsion de mort" est un concept proposé par Sigmund Freud, et adopté par la majorité des psychanalystes. L'aphorisme de Lacan:"la vie est ce qui résiste à la mort", en est nettement inspiré. "Elle" ne "tient pas la route" face à une position résolument biologique.