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Sceptique
3 septembre 2016

FAUT-IL SUPPRIMER L'ÉCOLE NATIONALE D'ADMINISTRATION?

Il y a deux sortes d'énarques*. Ceux qui font leur carrière dans les divers rouages du sommet de l'administration, et ceux qui entrent en politique par la porte des cabinets ministériels, attirent l'intérêt des ministres par leur compétence et leur efficacité dans la constitution des dossiers et leur aboutissement. La phase suivante est d'être incités à postuler un mandat électoral important pour le mentor et son parti.

Causes et effets en même temps, les histoires personnelles, familiales, et le besoin d'idées qui caractérise les têtes bien pleines, et bien faites, ont poussé ces jeunes gens à prendre position dans le débat politique principal, la place de l'État dans la vie du pays, sous ses deux aspects, à adhérer ou non à une idéologie ayant la politique parmi ses objets**.

Le premier rôle de l'État est celui qu'il a joué dans l'unification, la structuration, la modernisation du pays, son adaptation aux changements de l'environnement politique, créés par les nations rivales. Sa défense, contre les mêmes.

Notre passé monarchique, et guerrier, partagé avec l'ensemble de l'Europe, a créé dans notre langue l'adjectif de régalien, pour désigner les fonctions, indispensables et exclusives, de l'État.

Notre géographie, ses avantages et ses faiblesses, a contribué à façonner notre histoire et ce que nous en ressentons. La monarchie fut centralisatrice, et obsédée par la vulnérabilité de notre frontière Nord-Est. La qualité de nos terres nous dispensa de chercher d'autres moyens de prospérer que l'agriculture, à laquelle un artisanat suffisait. Dans le commerce européen, nos échanges étaient spécifiques.

C'est la monarchie qui créa des activités manufacturières en raison de ses besoins militaires, sur terre et sur mer. Ou pour réduire notre dépendance au savoir faire de nos rivaux.

Il en est résulté une dépendance de notre nation aux initiatives du pouvoir, qui est toujours au premier plan."Il" a, de son côté une difficulté à lâcher la bride, constatant, souvent, que personne ne profite de la liberté. L'ambivalence des français, entre demande et rejet du pouvoir, nous caractérise toujours.

Le pouvoir s'est donc naturellement centralisé, et s'est entouré de serviteurs à la fois fidèles et compétents pour satisfaire ses besoins spécifiques, civils ou militaires.

La nécessité d'une école (supérieure) pour les cadres de l'administration n'est jamais vraiment apparue. L'École Polytechnique, ses compléments comme les Mines, les Ponts et Chaussées lui founissaient les bons élèves, de bonne famille, qui lui étaient nécessaires. L'idée se serait forgée et consolidée au sein du gouvernement du Général De Gaulle, en 1958. Selon Michel Sapin, entendu hier, l'intention était d'ouvrir la haute administration aux élites issues de classes populaires. Les premières promotions, qui ont fourni beaucoup d'hommes politiques connus, n'en comptaient pas vraiment***. Je ne sais pas quelle est la proportion réelle d'élèves dont le destin a été "boosté" par leur passage par l'E.N.A. Notre "méritocratie" provient de diverses sources. Ses ingrédients de base sont la capacité et le travail.

Le saut qualitatif que permet notre enseignement supérieur sous forme d'Instituts ou de Grandes Écoles est toujours à la disposition des jeunes méritants. Ce que les dirigeants politiques font de leurs talents est une autre histoire. L'autre passage, par la voie de l'élection, "a les défauts de sa qualité". Une élection n'est que rarement une compétition de talents! Elle répond à un principe, la démocratie, qui, en principe, met entre parenthèses le mérite tout court. L'équation électorale est à plusieurs inconnues. La théorie du chaos y tient beaucoup de place. 

Mais, forcément, la tendance à mettre en cause la compétence de l'homme politique dans ses échecs ne prend pas en compte l'incompétence de ses adversaires. Un homme= une voix s'applique à toutes les valeurs du quotient intellectuel. C'est le risque permanent de la démocratie. Mais ce qui est toujours susceptible de la remplacer est encore pire. Il vaut mieux accepter tous les avatars du système.

D'ailleurs, ce qui apparait au premier plan des critiques et des condamnations de l'E.N.A. c'est que le diplôme n'a pas empêché les échecs. C'est vrai, mais il a pesé en faveur des succès. Le solde est en faveur de la formation.

Ce qui met en échec, et en péril, notre pays, depuis quelques  dizaines d'années, c'est sa fracture idéologique, en trois parties: droite libérale, gauche marxiste, en deux nuances, la socialiste et la social-démocrate, et le populisme. Le quasi équilibre entre les trois forces limite en temps et en amplitude les mouvements de l'ensemble. Le principe de Carnot**** est mis en échec, ce n'est pas plus compliqué que ça.

Sceptique

*Énarque, ancien élève de l'E.N.A.

**Libéralisme, Socialisme (dans sa version social-démocrate, presque toujours)

***Il est affirmé que les promotions récentes comportent des élèves d'origine modeste. Ceux qui ont terminé leur formation ne sont pas encore "en vue".

**** Le Principe de Carnot: l'énergie produit un effet en passant d'une source chaude à une source froide. En politique, si elle est piégée par la source chaude, "elle" ne fait rien. Si elle est dans la froide d'emblée, non plus.

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