PEUT-ON FAIRE LA GUERRE AVEC PEU D'ARGENT? LE GÉNÉRAL DE VILLIERS S'OBSTINE.
Sur le fond, le Général De Villiers a raison. On ne devrait pas s'engager dans une guerre sans avoir....un trésor de guerre. L'expression est "frappée au coin du bon sens", comme on disait de mon temps.
Mais l'histoire, la détaillée, montre que ce beau principe n'a jamais été placé en travers de nos démangeaisons guerrières, ou des nécessités imposées par nos ennemis. Les apitoiements de Bonaparte pour ses grognards, "l'intendance suivra " du Général De Gaulle, sont des goutelettes d'humour sur des coffres vides, avant même l'entrée en campagne.
L'histoire est maintenant mieux connue, grâce à l'indiscrétion des journalistes, qui ne pourraient pas vivre sans ces entorses au secret (toujours préféré par les politiques et les militaires). Pour commencer avec ce qui fait partie de mes lointains souvenirs, la guerre de 1939 a débuté avec une armée non préparée, un armement très en dessous, en quantité et en qualité, de l'indispensable. Cette fois là, nous en avons payé le prix.
Les "barouds d'honneur", réagissant aux soulèvements armés de nos colonies, indochine, puis, Afrique du Nord, ont achevé d'épuiser les surplus de l'effort de guerre américain, des années 1940-1945. La guerre d'Algérie, la seule à laquelle j'ai participé, a encore largement puisé dans ces stocks d'armes et de matériels américains. L'appui aérien y prenait sa part.
Le retour au pouvoir du Général De Gaulle en 1958 a été suivi par une amélioration, quantitative, et qualitative, de la situation de nos armées*. La force de dissuasion, permise par la maitrise de l'armement nucléaire, a remis nos forces armées à leur niveau de grande puissance. Mais il semble bien que la suite n'a bénéficié que de "l'énergie cinétique" des dix ans de l'ère gaulliste, et de son accalmie en matière d'opérations extérieures. Notre pays s'était débarrassé au prix fort de ses fardeaux coloniaux.
Qui sont réapparus avec les conflits internes de ces colonies, promues "nations", sans en avoir l'histoire, l'unité sociale, linguistique, religieuse. Le serment, unanime, de conserver les frontières léguées par les colonisations, s'est avéré intenable. Elles ont tenu bon, mais pas les peuples qu'elles forçaient à cohabiter. Les conflits ethniques sont toujours aussi ardents et féroces. Dès qu'ils passent aux actes, nous devons intervenir,** sans fixer de terme à notre intervention.
En ce qui nous concerne, par exemple, la cohabitation forcée entre les ethnies sédentaires et les nomades, se traduit par des luttes inégales, les nomades dominant, par leurs traditions guerrières, les laborieux sédentaires.
"Berkhane", modèle, s'il en est, d'intervention sans issue autre que politique, rompant avec le fixisme post colonial, n'aura jamais l'accord de la majorité malienne, pour laquelle nous combattons. Ce n'est qu'un exemple parmi les autres, réels, concrets, ou potentiels.
C'est une autre question que celle du financement, me direz-vous. C'est vrai pour le volume de la dépense, mais pas pour sa durée, son renouvellement, année après année.
"En même temps", tic de langage prêté au Président Macron, on ne voit pas d'issue satisfaisante à ces conflits sournois. Tant qu'on doit combattre, il faut s'en donner les moyens. Mais dans quelles poches se cachent-ils?
Si les français accordent une justification politique et morale à ces interventions, sont-ils d'accord avec leur enlisement? On est en droit d'en douter, et les convictions sur ces questions sont fragiles. Un attentat lié avec le problème élève le niveau des doutes. Les décisions purement politiques ne sont pas arrêtées.
Et il n'y a que le politique qui puisse décider que la guerre s'arrête, ou qu'elle continue, à son prix coûtant, qu'on peut suivre, ou non. S'il faut le prolonger, "au rabais", "on" le continue.
Que ça "fende le coeur" des généraux est une autre histoire.
Sceptique
*Mais aussi de nos finances, par une meilleure gestion.
**La contestation du pouvoir légitime(à notre sens) n'est pas toujours le fait de l'ethnie majoritaire, mais parfois, celle de l'ethnie dominante, plus "guerrière". La "démocratie" prend des coups.