MA PARTICIPATION À L'HOMMAGE À MAMOUDOU GOSSAMA.
J'étais devant ma télévision, ouverte sur LCI, quand tout d'un coup l'exploit a été annoncé, et le film diffusé. J'ai entrevu ce jeune homme courant vers l'immeuble, où un enfant était en difficulté, agrippé à la rambarde d'un balcon, les jambes dans le vide. Sautant , s'aggrippant, se rétablissant, pour saisir le niveau suivant, et d'étage en étage, parvenant à la rembarde surplombant l'enfant, puis le saisissant par son vêtement, et le propulsant vers le balcon.
Un moment plus tard, le sauveur était filmé dans la rue, justifiait son geste, affirmait l'aide divine, l'inspiration.
La suite, l'hommage unanime, le récit par le jeune homme de sa condition de clandestin, de son parcours d'exilé "lambda".
Il n'y a pas de doute, peu d'hommes, ou de femmes, auraient été dans la condition physique qu'a témoignée son exploit. Il s'est trouvé là, au bon endroit, au bon moment, et alerté par les appels, réalisant la situation, il a entrepris, à mains nues, l'escalade.
Soudain héros, sorti de son anonymat, il est passé de l'ombre à la lumière, il a changé de condition. Le pays d'exil, ex-colonisateur de son pays natal, l'a adopté, l'a fêté, l'a récompensé comme il ne pouvait l'imaginer! Comme ne pouvait l'imaginer personne, en fait.
Ce qu'on peut se dire, c'est que des milliers de migrants n'auront, ni les moyens, ni l'occasion de se faire découvrir de cette façon. Ils composeront le troupeau dont personne n'a besoin, dont personne ne veut. Un, qui le mérite de cette façon, ça va. Mille, non. Même à propos de ce brave garçon, d'aucuns ont fait la moue. Que faisait-il là, dans cette rue, à cette heure?
À cause même de ses exploits technologiques, l'humanité ne maitrise plus rien. Tout se sait en temps réel, en chaque mètre carré de sa surface. Il est logique que chaque africain qui cuit, le ventre vide, sous un soleil de plomb, rêve de quelques mètres carrés à l'ombre, au bord d'un fleuve, d'une rivère, ou, au pire, d'un canal. Il a, dans une poche de son haillon, l'enveloppe de la dernière lettre de son cousin, et l'adresse qu'il devra atteindre, comme il le pourra, dès qu'il le pourra.
L'ignorance ne s'apprend pas, a écrit Gérard de Nerval dans un de ses textes fumeux. Moins que jamais, de nos jours.
Si nos pays tempérés doivent devenir invivables, comme on nous le claironne, qu'en sera-t-il des fournaises déjà répertoriées, en même temps que les tropiques qui les situent sur notre globe?
J'y pense, et puis j'oublie (jacques Dutronc).
Sceptique