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Sceptique
2 juillet 2009

Bourrage de crânes et science

Comment remettre les hommes dans le droit chemin? Depuis des millénaires, la croyance la plus répandue était qu'il fallait leur faire peur. Du Maître, du Roi, du Chef, pour commencer, et c'était plutôt facile, vues les méthodes radicales de coercition en usage, sans complexe. Comme dans le même temps, s'était constituée la conviction que l'esprit échappait à la mort, la mise au pas de l'homme vivant se doublait d'un conditionnement préparatoire à l'au delà, afin qu'il n'imagine pas échapper à la punition des fautes commises sur terre, ni y trouver une jouissance sans entraves, sans bilan préalable de sa vie terrestre. Depuis cette situation de départ, notre société a beaucoup changé, et cela fait un moment que le citoyen réserve une partie de son temps à un minimum de plaisirs variés. Dont quelques uns constituent un danger, plus ou moins important, pour sa santé, ou même, pour l'ordre public. Je choisis la lutte publique contre le tabagisme, car cette addiction est paradigmatique pour la société moderne. La société (la nôtre, je précise) ne se préoccupe plus de l'au delà des citoyens. C'est une affaire strictement privée. Mais elle veille sur leur santé, d'une part, parce qu'elle la garantit en prenant une bonne part de la dépense, d'autre part, parce qu'elle veut protéger les biens-portants des effets de la mauvaise santé des malades. Dans ce cadre d'une bonne santé promise à tous, les comportements nuisibles à la santé, la sienne et/ou celle des autres, "interpellent" les pouvoirs publics. Dans un premier temps, il n'est pas question de sévir. Il faut donc montrer que c'est LA "maladie", preuve d'un manquement à l'hygiène de vie, qui va être la statue du Commandeur*. Elle est d'abord décrite par des mots, puis des mots et des images, sous forme de spots publicitaires, regroupés en campagnes. Les usages du tabac exposent sérieusement au cancer. De l'usager, c'est sûr. Depuis peu, il est prouvé qu'il peut atteindre un proche, victime d'un tabagisme passif, ce qui oblige moralement la société à augmenter la pression sur les fumeurs. Leur comportement n'est plus suicidaire, mais, disons-le fort, criminel . Ce fut ensuite l'inscription:"fumer est dangereux pour la santé", sur les paquets de cigarettes. Un frémissement, pas plus, vite amorti. La mention "FUMER TUE" lui succéda. Il y eut bien sûr des hausses de prix et, surtout, l'interdiction de fumer à l'intérieur des lieux recevant le public, comme les bars-tabac, précisément. Ce fut plutôt efficace, sur les urgences de pathologie vasculaire par exemple. Se souvenant des célèbres leçons d'éducation sanitaire du Dr Knock**, on en est maintenant à vouloir mettre sur les paquets de cigarettes des images horribles de cancers en phase terminale. Il a été, aussi, observé qu'une couleur triste, sans nom de marque en couleur, sans logo, rendait les paquets de cigarettes moins attirants. Les fabricants ne sont sûrement pas prêts à faire l'expérience!. Patatras, une étude récente révèle qu'une image de cette sorte présentée à un fumeur....excite les aires cérébrales associées à l'envie de fumer! Bon, il ne faudrait pas conclure que les actions anti-tabac sont totalement inutiles, mais la coopération, la volonté du fumeur, sont indispensables, et le résultat ne résulte pas d'un mécanisme purement pavlovien. L'homme est homme. Il se défend contre l'intrusion de "l'autre", quelle que soit la qualité de son message. Le message sanitaire est forcément UN. Sa vérité est globale, sans nuances. Il témoigne d'un haut niveau de préoccupation de l'autorité politique quant à la santé de citoyens....de plus en plus individualistes. S'agit-il d'un simple phénomène de balancier, les progrès de l'individualisme obligeant la société à augmenter sa pression dans la même proportion? Il me semble qu'un excès de prévention pourrait aboutir à des comportements contraires, de révolte, de provocation. L'homme dispose toujours de sa réserve de paranoïa, de déni que l'État veuille son bien, s'occupe de son bien-être sans arrière pensée. La société, l'État, sont "personnalisés". On retrouve la statue du Commandeur! Sceptique *"Don Giovanni" de Mozart. Livret de Da Ponte **Knock ou le triomphe de la Médecine, pièce de Jules Romains. Louis Jouvet a incarné le rôle.
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Commentaires
E
Il me semble que les comportements addictifs ne sont pas d'aujourdhui... <br /> Ni le double discourt du monde politique...<br /> <br /> "Nil novi sub sole" dit je crois, l'Ecclésiaste !<br /> <br /> Même si l'état s'est "refait une propreté" en larguant la patate chaude au privé, il n'en reste pas moins qu'il touche des royalties que l'on habille pudiquement du nom de "taxes", sur la vente du tabac ainsi que sur celle des alcools et autres substances telles que somnifères etc.<br /> <br /> Mais la contradiction n'est pas la moindre des contradictions humaines; c'est peut-être même cela-même qui caractérise l'humaine condition et le plus amusant à observer...
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S
L'État a rendu au secteur privé la fabrication des cigarettes et autres formes de consommation. Par contre il garde le contrôle de la distribution (débits de tabac) et utilise les hausses des taxes pour dissuader les consommateurs. <br /> Sa politique vise à réduire la consommation, à diminuer à la source, essentiellement, le nombre de dépendants. Comme il est difficile d'attendre du secteur privé ce qui serait pour lui un suicide collectif, l'État s'en charge, au risque de sa popularité. Les "casseroles" héritées du passé ne disqualifient pas cette action. On n'ose l'imaginer aussi rigoureuse pour la dive bouteille, malgré quelques efforts sur ce terrain là, aussi.
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E
En tant que producteur, l'État français est en contradiction avec lui-même puisqu'il contribue de ce côté-là à créer la problèmatique de santé cardio-pulmonaire qu'il tente à résoudre de l'autre !!
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Sceptique
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