Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Sceptique
24 janvier 2011

Ségolène Royal au Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro(2011)

Il n'y a pas de doute, la prestation de Ségolène Royal à ce Grand Jury de ce Dimanche 23 Janvier a été bonne. Elle s'est vite détournée des coups de griffe d'opposante pour aborder sa vision de la France d'aujourd'hui, et "ses" recettes pour 2012.

Interrogée d'abord sur les événements du Mahgreb, elle rend un hommage appuyé aux tunisiens, et approuve leur exigence de voir les anciens ministres de Ben Ali remettre à des personnalités d'opposition le soin d'organiser les prochaines élections, dont devrait sortir la légitimité incontestable. Elle balaye, cependant, le fait que la transition suivant le départ du Président devenu dictateur, a été accomplie, dans un second temps, selon les règles de la constitution tunisienne. La défiance absolue des tunisiens à l'égard du pouvoir intérimaire n'est pas sans danger. Aucun pouvoir honnête et serein n'a beaucoup de chances d'émerger d'un désordre absolu et prolongé. 

En quelques phrases, elle souligne que la durée excessive d'un pouvoir le dévie fatalement vers le favoritisme, l'autoritarisme, le cramponnement au pouvoir. La démocratie, c'est l'organisation de la transition. 

Ce sont les affaires françaises qui sont évidemment les plus importantes. La dégradation structurelle et conjoncturelle de notre économie, de notre puissance industrielle, et, en conséquence, les problèmes sociaux graves et des déficits publics préoccupants, qui nous contraignent à l'austérité(encore très relative!), donne la priorité à "son" programme. 

C'est la question d'Étienne Mougeotte sur son concept de "licenciement boursier", qui ouvre le débat sur la situation française et les solutions qu'elle envisage.

Le licenciement "boursier", c'est ce licenciement qui résulte de fermetures d'usines, sans justification par la situation difficile de l'entreprise, ou même, par celle de l'usine frappée par la décision de fermeture. Les salariés portent l'affaire devant la justice, qui au vu des comptes de l'entreprise, frappe de nullité le licenciement pour motifs économiques, puisque l'entreprise n'a pas pu démontrer la vérité de ce motif. Les salariés ont la satisfaction d'amour-propre de recevoir raison, mais il faut un autre procès pour faire payer les indemnités prévues par le jugement.

Que faire? "Mettre dans la loi qu'aucune entreprise en croissance, au bilan bénéficiaire, ne pourrait prétendre à la qualification d'économique pour un licenciement collectif".

Un journaliste lui oppose qu'il n'y a plus d'autorisation administrative de licenciement. Elle le reconnait, et n'envisage pas de la rétablir. Donc, l'évaluation de la légitimité d'un licenciement collectif ne peut être faite que par la justice, et la justice a toujours besoin de temps pour rendre son avis. De toute façon, susceptible d'un appel. 

Ségolène Royal recommande donc la participation des partenaires sociaux, autrement dit, des syndicats, à la gestion des entreprises, c'est à dire leur présence dans les conseils d'administration. Ils le sont déjà dans les entreprises publiques, et il n'est pas établi que leurs avis vont toujours dans le sens de l'intérêt de l'entreprise. Il faudra donc une révolution culturelle des syndicats, ce qui, dans la situation actuelle, de compétition et de surenchère, associée à une irresponsabilité civile et pénale, devra être imposée au préalable*. Le patronat privé n'en veut absolument pas.

Ségolène Royal invoque les exemples de l'Allemagne et de la Suède. Formidables, en effet. Mais ils procèdent d'une toute autre mentalité. 

Elle préconise la création d'une banque nationale d'investissement (les banques privées sont accusées de se dérober à cette fonction), pour aider les entreprises petites et moyennes à se développer. C'est sur elles, reconnait la candidate, que reposera la reprise économique, condition "sine qua non", au profit de tous les aspects critiques de la société française, y compris ceux des services publics.

"On" lui fait remarquer l'existence d'Oseo (et du Fond public d'investissement). Elle reconnait l'existence et la qualité de l'action d'Oseo, mais souligne l'insuffisance des moyens mis à sa disposition. La séparation des activités traditionnelles et de la spéculation lui semble indispensable à imposer aux banques privées. Au passage, elle accuse le Président Sarkozy de l'annoncer et de ne pas la mettre en pratique. Est-ce si facile dans une économie ouverte et concurrentielle, sachant que les salles de marché fournissent l'essentiel des ressources des banques, et font leur image internationale?

"Il faut relancer la croissance par la confiance". Qui ne souscrirait pas à une telle évidence? Les hausses d'impôts, évidentes, aussi, pour l'opposition, n'iraient-elles pas à l'encontre de cette proposition? Responsable, Ségolène n'a pas les coudées franches d'un Mélenchon, pour décrire la formule magique.

Sur les conditions de travail, elle veut s'attaquer à l'aspect de leur sécurité, qui pèse sur le coût du travail. 3% de la richesse nationale, avance-t-elle, en ajoutant la part, importante en France, du stress**.

Mettant toujours en avant les performances en matière de régulation sociale, de modération salariale, l'Allemagne et la Suède, elle appuie sa démonstration sur le partage équitable, entre le patronat et les salariés, des sacrifices à consentir. Là, encore, est-il possible d'imaginer une telle capacité de dialogue social au sein des entreprises françaises? J'avoue, pour ma part, mes doutes, et notre "exception culturelle" n'est pas fictive, et révocable par un simple "yaka".

Le débat passe ensuite aux primaires organisées par le PS et à ses chances d'être sélectionnée. Elle est consciente de la possibilité de manoeuvres destinées à l'évincer, et attend d'une "commission indépendante", pas encore définie et composée, le contrepoids nécessaire à ces pressions, dictées par les ambitions rivales...et les inimitiés réelles. Mais elle récuse avec hauteur les conclusions tirées des sondages actuels, qu'elle soupçonne d'être commandités....par l'Élysée!

Sceptique

*Lors de sa campagne de 2007, Ségolène Royal envisageait l'affiliation obligatoire des salariés à un syndicat. C'était une très bonne proposition, devant cependant être assortie d'une définition de leur responsabilité envers leurs mandants. L'extension de cette obligation à toutes les professions serait également recommandable.

**Une solution à ce problème serait de définir la cotisation des entreprises pour le risque accidents de travail, auquel il faudrait associer les pathologies associées aux conditions de travail, non pas par branche, mais entreprise par entreprise, l'absentéisme pour ces deux causes pouvant être repéré par les caisses et servir de base aux cotisations patronales. 

Publicité
Publicité
Commentaires
L
Il ne faut pas recommencer l'accompagnement du système ultra-libéral comme l'ont trop souvent fait les socialistes. Je ne voterai que pour celui ou celle qui annoncera des réformes de fond du genre (juste répartition des richesses et remise à plat de la "mondialisation heureuse"). Ceci pourrait passer par une réforme du système banquaire, de la bourse et des impôts.
Répondre
Sceptique
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité