Marine Le Pen au Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro-2011-II

J'ai été surpris, en me branchant sur cette émission dominicale, quelques instants avant son début, de "tomber" sur Marine Le Pen, l'invitée de ce soir. Sa précédente invitation me paraissait si proche, ou son souvenir si frais!

Une utopie "en béton", voilà comment j'ai ressenti le projet d'une cohérence diabolique, décrit et défendu, bec et ongles, par la Présidente du Front National et candidate à la Présidence de la République  en 2012.

Sur ce sujet, en réponse à la question de J.M.Aphatie, elle a dénoncé les manoeuvres tendant à dissuader les maires de signer pour elle et son parti. Dénoncé, aussi, le système électoral fait pour interdire au FN d'accéder à des responsabilités à l'échelle nationale. Le réflexe paranoïaque, justifié, il faut le reconnaitre, du Front National, est mis en exergue. "Il" sait d'avance pourquoi il sera battu.

Nationaliste, "souverainiste", hostile à l'euro et à l'évolution fédéraliste, automatique, inévitable, de l'Europe , Marine Le Pen met tous les malheurs, passés et à venir, de la France et des français sur le dos de l'aventure européenne. 

Convaincre les français, battre en deux manches, et le Président sortant, et le rival socialiste, elle y croit. L'un et l'autre sont équivalents, ont des vues, positives, identiques, sur tout ce qu'elle exècre, et le sort dramatique de la société française est scellé dans les deux cas.

Son programme, c'est sortir de l'euro et de l'Europe. Quand Étienne Mougeotte lui fait remarquer que la dette de la France est libellée en euros, et lui demande comment "elle" va faire pour la régler, ou placer la France en cessation de paiement, elle énumère les énormes économies qui gisent dans les budgets consacrés à.... l'immigration, et dans ceux des collectivités locales, qui permettraient de s'acquitter de la dette, en quelques années. Balayant l'argument de la réciprocité de tout protectionnisme, elle dénonce notre soumission à la Chine, qui profite de son non-respect des règles sociales et environnementales pour conquérir nos marchés, et se fait remettre, en plus, des transferts de technologie, qui lui permettront, à terme, la domination sans partage du monde. "Elle" s'entendra avec les états de l'Europe qui partagent les mêmes principes et valeurs, pour mettre au bon niveau, au cas par cas, les barrières douanières. 

Sa politique étrangère n'est pas moins logique. Elle désavoue notre action en Libye qui va mettre ce pays sous la férule des islamistes et de leur "charia", elle défend Bachar El Assad, elle admire Vladimir Poutine, qui a arraché la Russie à la cupidité des oligarques. Leur manière forte anticipe sur celle qu'elle mettra en oeuvre pour restaurer "l'autorité de l'État. Elle n'oublie pas, en conclusion, de mettre en garde contre les afflux de "réfugiés", en cas de dérive théocratique des nouveaux pouvoirs annoncés en Libye, mais aussi en Tunisie, "soutenu par 50% des franco-tunisiens...qui votent aussi aux élections françaises*"

Sur le sujet de la sécurité, elle dénonce les effets de l'impunité dont jouiraient les délinquants en France, exemptés de peine réelle, si elle est inférieure à deux ans, ou relâchés par les juges au prétexte du manque de places en prison. 

Comment le trio de journalistes a accueilli ce programme et son porte-parole? Sans complaisance, de toute évidence. Coupant la parole, sans cesse, ou couvrant par leur démontage simultané, ses démonstrations. C'en était quand même gênant, ce recours excessif au "tir de barrage".

Le programme de Marine Le Pen et du Front National risque de peser un certain poids, en face de ceux qui vont défendre les bases européennes du destin français. Tant il est sûr que l'idée européenne est difficile à vendre en ce moment. Il est de bonne guerre, de la part de Marine Le Pen, de ramasser au profit de sa thèse l'ensemble des NON de 2005. Elle a personnellement réussi à rallier quelques souverainistes de gauche. Son principal trophée est un jeune énarque qui sera son conseiller pendant sa campagne. "Comment un énarque peut-il être au Front National?" a été le cri du coeur de Jean-Michel Aphatie!

Telle qu'elle se présente, la candidature de la Présidente du Front National pourrait bien séduire un nombre conséquent d'électeurs touchés pas la crise. Des tentatives de l'écarter préventivement, par des moyens anti-démocratiques, seraient contre-productifs. Les règles de l'élection présidentielle, combinées à un nombre excessif de candidatures illusoires, pourraient lui permettre d'être au deuxième tour, comme son père le fut en 2002, mais elle ne gagnera pas l'élection. Il n'y a pas de rassemblement possible sur son nom au deuxième tour. Dans ce cas qui répéterait le coup du 21 Avril 2002, le Front Républicain se reconstituerait aussi, en espérant qu'il soit mieux exploité qu'en 2002, qu'il permette, au moins temporairement, un gouvernement d'union nationale.

Sceptique

* Elle dénonce en passant les inconvénients de la "bi-nationalité", qu'elle abolira.