Taxe carbone, chapitre II...et III
L'ancien premier ministre socialiste Michel Rocard, chargé par Nicolas Sarkozy d'explorer cette proposition écologiste, a rendu son rapport.
La France profonde, dont la réputation de savoir ce qu'elle veut est proverbiale, monte aux rideaux. Ce n'est que cris d'horreur et gémissements. Les écologistes, qui pensaient faire plaisir aux français en distinguant ainsi leurs vertus, sont gênés d'avoir à découvrir des pécheurs invétérés. En fait, pour faire court, chaque français pensait que l'excellente taxe carbone allait être payée par: 1)les autres. 2) les voleurs. C'est à dire... par LES AUTRES.
Michel Rocard a la rigueur d'un protestant, et la rugosité des hommes intelligents, peu compatible avec les qualités de l'anguille ou du serpent. N'oublions pas qu'il fut l'inventeur de la CSG, recette indispensable de l'Assurance Maladie. Seulement, il la déclara non déductible, ce qui signifiait qu'elle était, aussi, punitive des comportements hypocondriaques ou pharmacophiles. Avant de courir chez le médecin pour un bobo, les français avaient intérêt à penser au taux de leur CSG.
Il était évident que les français feraient avec leur consommation de soins ce qu'ils faisaient avec leurs voitures: on râle, mais on roule!
Puisqu'il était logique que les besoins de financement de la Sécurité Sociale ne s'arrêteraient pas au taux initial de la CSG, mais pourraient grimper allègrement vers les dix pour cent ou plus, il fallut lui donner une soeur, qui grandit plus vite que son aînée, la CSG déductible, sur laquelle vous ne payez pas l'impôt. Il aurait été plus logique de refaire une CSG totalement déductible, mais revenir sur une fausse bonne idée est une humiliation, et simplifier les bulletins de salaire est une "horreur administrative".
La patate brûlante est maintenant entre les mains du gouvernement et du Président de la République. Qui vont s'empresser d'en revoir tous les éléments. D'abord, le taux. Maladroitement excessif, pour un début. 32 euros la tonne de CO2, alors qu'entre industriels, elle se négocie à 15 euros(ou même moins). 5% d'augmentation par an, pour arriver à 100 euros en 2030. De quoi faire sauter un Président et sa majorité aux prochaines échéances de 2012 !
L'assiette: y mettre l'électricité, ou pas? Pour: la consommation plutôt débridée d'électricité par une majorité insouciante d'utilisateurs, les plus jeunes, en fait, oblige à programmer la production capable de la suivre (sans compter le développement prévu de la voiture électrique). Nucléaire (beurk, trois fois) Eéolien (beurk, quatre fois), Thermique (personne ne dit beurk, mais c'est complètement illogique), Solaire, à l'état embryonnaire, chez nous. Contre: notre production repose pour l'essentiel sur des énergies ne larguant pas de CO2. Retour aux arguments précédents.
Le destin de l'argent collecté: dédié, ou non dédié? Redistribué, ou inclus dans le poste recettes de l'État? On semble écarter une redistribution intégrale qui serait forcément injuste et illogique. Une utilisation sociale au profit des plus pauvres, sur le poste énergie, serait normale. La plus saine serait le financement des travaux en vue d'économiser l'énergie, sur les bâtiments anciens. C'est, officiellement, l'option retenue. Il faut s'attendre à ce que le gouvernement modère le taux initial et la progressivité de la taxe, ne serait-ce que pour franchir sans trop de mal l'échéance de 2012 qui sera lourde.
Les optimistes quant à la fin prochaine de la crise commencent à être plus nombreux que les pessimistes. Les révolutionnaires radicaux resteront sur leur faim. Mais il y aura encore des séquelles de la crise en 2012, qui seront surexploitées par l'opposition.
Sceptique
Post-scriptum: La logique de cette taxe repose sur un consensus: il y a un changement climatique, et les humains en sont les seuls responsables. Cette "Vérité" ne fait pas l'unanimité au sein du monde des scientifiques, même si la majorité s'efforce de faire taire les contestataires. Cependant, l'effort est justifié par la nécessité de préparer l'après-pétrole, à une échéance qui recule toujours, mais pour combien de temps? Préparer l'après-pétrole repose sur les énergies de substitution, dont certaines seront productrices de CO2.
Note du 7 Août 2009: Dans le "Monde" du 1er Août 2009, l'économiste Alain Quinet, inspirateur de la commission dirigée par Michel Rocard, défend les montants proposés au départ de la nouvelle taxe et sa progressivité "fulgurante". Son raisonnement est sûrement juste si les bases scientifiques qui le justifient le sont également. Il est postulé que la température du monde, telle qu'elle est partie, nous mène tout droit vers un climat torride universel. Tout ça, par notre faute. Et qui dit faute, dit punition.
C'est à la mode! Il y a deux ou trois jours, il était reproché à nos producteurs de fruits et légumes d'avoir reçu des aides de l'État pendant dix ans pour compenser les distorsions de concurrence. Remboursez, dit la Commission! Remboursez, répète en écho le Ministre! Voilà l'État converti à la sévérité des Caisses d'Allocations Familiales, impitoyables pour les fraudeurs, de bonne foi ou pas.
La différence, c'est qu'il s'agit là de politique, et non de fraude. Et la taxe carbone, c'est aussi de la politique. Pour cette taxe rationnellement justifiée, l'opposition est à l'affût. Vert fluo ou pas, elle est contre tant qu'elle n'a pas le pouvoir. Le choeur* (de l'opposition) a ses raisons que la raison ne connaît pas!
Conclusion: taxe carbone, peut être, mais à un taux plus doux. Ou mieux, la mettre sous le coude. Pour sûr, l'opposition la mettra à son programme!
*Je dis bien: le choeur.