Des hommes en bleu à Montparnasse
"Les infirmiers-anesthésistes occupent les voies à Montparnasse". Ce titre est grammaticalement correct: il y a des hommes dans la profession et parmi les manifestants.
Mais il est aussi significatif du machisme résiduel de notre société. C'est, en effet, parce que cette spécialité est devenue majoritairement masculine qu'elle est plus combative et a fini par mener cette action spectaculaire et dérangeante.
Bien sûr, notre appareil politico-administratif n'a pas pris conscience de ce changement. D'une profession traditionnellement féminine "il" est convaincu qu'il peut faire ce qu'il veut. Sans même regarder les images de la télévision, notre Ministre de la Santé a refusé de recevoir une délégation de ces grévistes. Des nanas, bof! C'est vrai aussi pour les nanas de pouvoir!
De "nanas", la profession médicale en est maintenant bien pourvue, mais heureusement pour elle, les mecs qui trustent les diverses formations syndicales font écran à cette réalité. Leurs interlocuteurs politiques seraient-ils, maintenant, moins abusés? Outre que les médecins ne font jamais de grèves aussi dures et aussi unanimes que les cheminots ou les agents des transports publics, les doctoresses, dont la plupart ne travaillent pas à temps complet, assurent le service minimum. Chez les infirmières , hospitalières ou libérales, les sage-femmes(hospitalières) le devoir passe aussi avant tout.
Est-ce un fait de nature, ou un fait de culture? Les deux, mon général. Difficile de faire la part des choses, l'éducation, les rapports mère-fille, et père-fille, relançant à chaque génération la disponibilité d'un sexe, la coriacité de l'autre. Une particularité culturelle française ajoute sûrement une touche* de machisme à l'ensemble. Il est établi que notre pays est loin des premiers rangs en matière d'égalité...de destin, des hommes et des femmes.
Pour autant, je doute de l'efficacité de lois de discrimination positive en la matière. Il en existe déjà un certain nombre, et il est de bon ton de souligner leur échec. Qui commence avec l'indifférence des intéressées.
C'est pour une part à leur honneur. Telles qu'elles sont façonnées par leur histoire et leur éducation, les femmes françaises n'arrivent pas à être aussi "simplistes" que les hommes. J'ai eu l'occasion de comparer des femmes de haut niveau de formation universitaire, américaine ou française. La différence est frappante. Il semble bien que de l'autre côté de l'Atlantique, le problème est nettement plus avancé. Les femmes se sentent complètement les égales des hommes, à niveau professionnel comparable, sans se "masculiniser" pour mieux se défendre.
Par ailleurs, en France, en tout cas, les systèmes non-dits, ritualisés, qui "gèrent" les professions depuis des siècles, restent parfaitement intégrés dans les esprits, masculins comme féminins. Personne n'y déroge! Chacun reste à sa place**.
Train-train, ou trains? Nous n'arrivons pas à choisir!
Sceptique
*Ou une louche!
**Leur paradigme est peut-être à l'Université, dont les rites de passage (soutenance de thèse, habilitation), sont des copies fidèles, en esprit, des rites initiatiques des peuples primitifs. Je soupçonne, cependant, les professions judiciaires "d'enfoncer" toutes les autres sous ce rapport.