Sarkozy, candidat, entre en campagne.
Nicolas Sarkozy, Président de la République "sortant", a déclaré hier soir, face à une de nos plus antipathiques présentatrices*, sa candidature à un deuxième mandat.
Trop tard, trop tôt, bien, pas bien? Peu importe. Le combat va devenir plus égal. Tous ceux qui sont déjà en campagne annoncent des lendemains enchanteurs capables de nous faire oublier les cinq ans d'enfer que nous viendrions de traverser. Tous bénéficient de la capacité d'oubli des humains et ont pu glisser sous le tapis les bêtises commises par leurs parents politiques. Le bilan de Nicolas Sarkozy, lui, est actuel, tout frais. Il ne peut profiter de l'oubli, et peut souffrir des plus tendancieuses interprétations. Son entrée en lice va lui permettre de défendre sa personne à travers une autre présentation de son bilan, que je considère, avec le recul de soixante dix ans d'intérêt soutenu pour la vie politique et l'évolution de notre société, comme franchement positif du côté des traits structurels, particulièrement archaïques, et un peu moins du côté conjoncturel, en raison de la crise, certes, mais aussi de "notre" capacité de résistance à tout changement de notre mode de vie.
Vouloir faire de la politique, vouloir le pouvoir, c'est une "anormalité". C'est faire son deuil de sa tranquillité, de sa liberté, de son sommeil, de sa vie de famille, pour une existence fébrile, harassante, faite de louanges et d'insultes. La seule récompense est l'inscription dans l'Histoire. Autrefois cet accès au pouvoir ne reposait que sur les rapports de force les plus brutaux, puis, une fois le pouvoir conquis, son prolongement par transmission héréditaire, jusqu'au coup de force suivant. Les hommes ordinaires, uniquement soucieux de vivre et de faire vivre leur famille, en étaient exclus.
La démocratie postule que le vrai pouvoir est détenu par le peuple, et que ce dernier l'exerce par délégation à des hommes (et des femmes....il faut le dire vite!) qui veulent bien accepter ces responsabilités précaires et révocables. La réalité est toujours la lutte pour le pouvoir, mais sans armes, uniquement par l'éloquence et la rhéthorique. La montée dans la hiérarchie pyramidale des hommes de pouvoir est sélective. Il faut pouvoir grimper sur ses faces et ses arêtes, ne pas rester trop longtemps à l'intérieur.
Aucun homme politique en route vers le pouvoir, ou s'efforçant de s'y maintenir, ne cesse de se préoccuper de son image, de son amour propre. Le service de la société, du pays qui lui a été confié, ou qu'il souhaite lui voir confié, n'est pas dissocié de son image personnelle. C'est d'ailleurs cette connection que des faiblesses humaines peuvent entamer ou faire rompre. C'est toujours sur cette connection que les attaques des concurrents sont les plus ciblées. D'un autre côté, les efforts pour rester en selle, ne pas se faire jeter à bas de la monture appelée "pouvoir", sont bénéfiques à l'image de soi, de sa préservation, au prix de quelques sacrifices. Paradoxe d'un salut passant par l'oubli de soi!
La spécificité de Nicolas Sarkozy, son ambition, sa combativité, sa volonté de réussir toutes les actions qui mobilisent son émotion (que de deuils a-t-il été contraint de faire!), se résume à un refus d'un destin plus ordinaire, celui qui, en France, échoit à qui n'est pas passé par les filières d'excellence, Polytechnique, Normale Sup, ENA**.
Cette méritocratie n'est elle pas, justement, la cible des critiques de ceux qui n'en font pas partie, qui y voient le handicap d'une authentique démocratie? Parmi ces critiques, quelques grosses têtes sorties de ces moules, justement. Et qui ne ratent pas l'occasion de souligner que Nicolas Sarkozy n'est pas des leurs.
C'est pourquoi il est juste qu'il puisse défendre son bilan, structurellement très positif, et qu'il fasse valoir ses mérites à le prolonger, jusqu'à la limite qu'il a lui même fixée et fait inscrire dans la constitution.
Sceptique
* Elle est au service d'une chaine indépendante (du service public), mais "amie". Nicolas Sarkozy ne compte que très peu d'amis dans les médias. Ses rivaux non plus, en réalité. S'il y a "alternance", au bout du parcours, elle se fera en sens inverse dans les médias! Garanti!
**Ses projets ambitieux, teintés d'ambivalence, en faveur de l'enseignement supérieur, sont symptomatiques du sentiment de frustration qu'il pouvait justement ressentir.