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Sceptique
14 janvier 2013

PSYCHIATRIE ET SOCIÉTÉ.

C'est un commentaire d'un quotidien québécois qui me ramène à une décision de justice symbolique, que je n'avais pas commentée en son temps. Je ne doutais pas qu'elle le serait par la profession, sévèrement.

Il s'agissait d'une psychiatre du service public, traduite en justice, et condamnée à une peine sévère, avec sursis, à la suite de la plainte de proches d'une victime d'un de ses patients, en crise, conséquence d'une interruption de son traitement.

J'ai plusieurs fois rappelé, à propos des passages à l'acte de malades mentaux, que les espoirs placés dans les traitements des maladies mentales rencontraient tous une limite: s'ils font disparaitre les symptômes et les troubles du comportement, permettant la sortie de l'hôpital, et le retour, dans la famille, dans son environnement social, la maladie n'est pas guérie, et le traitement doit être suivi, régulièrement administré, faute de quoi la rechute est inéluctable. C'est un constat qui a été fait assez rapidement après l'apparition de ces traitements qui ont révolutionné la pratique de la psychiatrie, la réduction de la place de l'hôpital spécialisé, et le suivi des malades par les équipes de secteur.

Celles-ci, étoffées au début du triomphe de la psychiatrie, ont vu leurs effectifs de soignants de toutes fonctions fondre par le quasi arrêt de leur formation, et l'attribution du Diplôme d'État d'Infirmier à tous les personnels de ce grade que l'Hôpital Psychiatrique formait pour ses besoins, jusque là. La pénibilité du travail n'étant pas comparable, de nombreux agents de ce grade ont quitté l'hôpital psychiatrique pour l'hôpital général.

Il est donc devenu très difficile, pour les équipes extra-hospitalières, de courir après les patients en rupture de traitement. La fréquence des rechutes a augmenté. La folie "douce" a fait partie du quotidien des citadins, les troubles de l'ordre public ont mobilisé Police Secours, et les passages à l'acte meurtriers, de délires de persécution, la Police Judiciaire, les médias, et les responsables politiques, du plus haut niveau.

Cette négligence de la psychiatrie, par les responsables politiques, dès les années 1980, a été reçue comme allant de soi de la part de profanes ignorants, alors qu'elle concernait toute la médecine, rétive et coûteuse. Le retour aux affaires de la droite, "naturellement" antipathique pour la majorité de la profession n'a rien arrangé. "Il" ne fallait rien attendre d'une majorité honnie. Ne pas plaider la cause de la psychiatrie auprès de ses responsables mal intentionnés et bornés. Un zeste d'anti-psychiatrie, de passion pour le respect de la liberté de l'homme, a complété le cocktail. Très nettement, les porte-paroles refusaient le souci de la sécurité publique parmi leurs missions. 

Le grain de sable d'une plainte pour défaut de soins entrainant un risque, que le médecin ne pouvait ignorer, a mis sur la place publique ce problème à la fois pratique et éthique. Un point de vue philosophique, ou idéologique, ne peut abolir les obligations de service public de tout médecin. C'est ainsi, en tout cas, que l'opinion et la justice voient ces choses en France.

Ce que remarquait le commentateur québécois, c'est que dans la Belle Province, les faits de cet ordre ne sont considérés que comme des fautes professionnelles, qui ne déclenchent pas des actions "criminelles", mais simplement "civiles", visant à une réparation financière aux ayant-droits des victimes indirectes de la faute (arrêt des soins ayant entrainé une rechute et un passage à l'acte).

J'ai eu le sentiment, en prenant connaissance de cette façon de prendre les faits de cet ordre, qu'elle n'était pas imaginable de ce côté-ci de l'Atlantique. La loi du talion y est de plus en plus à fleur de peau.

Sceptique

 

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Commentaires
S
@cdc<br /> <br /> Je serai toujours heureux de vous lire. Quelquefois, je ne me sens pas compétent dans les domaines qui vous passionnent, mais il suffit d'attendre.
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S
La schizophrénie et l'autisme ne sont pas des indications de la psychanalyse, j'en suis bien d'accord. Pour ces deux affections, ou groupes d'affections, elle "bénéficia" de l'impuissance de la psychiatrie, antérieurement à la découverte des psychotropes, car elle avait le mérite de chercher à comprendre, au lieu de simplement observer, et attribuer un diagnostic. Elle conserve un grand domaine de compétence dans toutes les pathologies où le cerveau n'est pas en cause en tant qu'organe, mais lieu d'inscription de tous les avatars de la vie d'un sujet. Il n'est pas inutile qu'un psychiatre possède la double formation, qu'il soit médecin et psychanalyste. Même en matière de psychose, l'écoute, l'empathie, ne sont pas superflues. Il faut éviter le "ou, ou" et chercher le "et, et". Ne pas être au service d'une théorie, mais d'une personne souffrante,et/ou, en danger.
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C
You're way ahead of me... Vos posts récents me font vouloir y répondre mai je suppose que vous savez qu'être "à la retraite" signifie avoir moins de temps libre !
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E
Il ne s'agit pas, pour les familles, d'un point de vue théorique : aujourd'hui, la psychanalyse est profondément remise en cause par le rôle d'étouffoir qu'elle joue vis-à-vis des autres pratiques thérapeutiques.<br /> <br /> Au sujet de méthodes qui ont fait leurs preuves dans le traitement de l'autisme, la France accuse un retard de plusieurs décennies. Un retard artificiellement créé par une corporation armée d'une idéologie, au dépend de la santé des patients.
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Sceptique
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