Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Sceptique
13 avril 2015

LATIN-GREC, LA BATAILLE DES ANCIENS ET DES RADINS.

La France est un pays très conservateur. Aucune question sur l'utilité sociale d'une marque du passé n'est acueillie par un silence. Au contraire, des foules que la question n'empêchait pas de dormir, avant d'être posée, deviennent insomniaques dès quelle a été jetée en pature.

Ainsi de l'enseignement du latin, passé de l'indispensable pour beaucoup de familles il y a soixante-dix ans, à l'inutile pour la même proportion, ces dernières années. 

Mais comment priver les lauréats de l'École Normale Supérieure, et ceux du concours de l'agrégation de lettres classiques, de leur utilité, si on prend acte de la raréfaction des demandeurs? 

Déjà, le nombre de postes offerts à l'agrégation de lettres classiques est devenu très faible. Tout en restant très difficile, car la compétence en ces matières ne peut être relative. J'ai appris, il y a quelques jours, que tous les postes offerts ne pourraient être pourvus, car le nombre de candidats admissibles était inférieur au nombre proposé.

Nous traversons des années de vaches maigres de plus en plus maigres, mais le culte des vaches grasses n'en est que plus intense. De grands cris s'élèvent pour que la ration des vaches soit de plus en plus fournie, au besoin en affamant les autres espèces, en particulier l'animal humain*.

J'appartiens à la génération encore gâtée sur ce plan des "humanités" (ce qui exclut une bonne partie de la population de la terre), et pourtant, maintenir leur enseignement à tout prix pour quelques escouades d'élèves n'est pas la bonne solution. Quelle pourrait être une meilleure? La formule du conservatoire offert aux passionnés, là où il est fortement demandé, sera une solution. Les Universités disposeront toujours de chaires entretenant la flamme de la connaissance et de la recherche. 

Mais raconter que la disparition de l'enseignement du latin et du grec dans les collèges serait une atteinte à l'égalité, est se moquer du monde....d'aujourd'hui, où ces études constituent précisément une revendication d'inégalité, symbolique, au moins. Elles n'ajoutent aucune chance particulière à personne**.

Pour d'autres, c'est un casus belli en direction de la belle enfant qui a la charge de dresser le mammouth. Chercher à le faire maigrir est tout simplement anticonstitutionnel, tout le monde est d'accord.

Sceptique

*Par une taxe à l'instruction ajoutée, proportionnelle au X de "bac + X"

**Ayant étudié, en amateur, par pur plaisir, la langue portugaise, très proche de la nôtre par sa syntaxe et sa grammaire, j'ai le sentiment d'avoir re-découvert le français, souvent très mal justifié. Le "c'est comme ça et pas autrement" n'est pas réservé aux casernes!

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
S
Ni l'un, ni l'autre. C'est peut-être triste de voir réduire le budget de la culture, mais il y a d'autres urgences; dont celle de préparer nos jeunes au monde tel qu'il est. Je ne parie pas sur la fatalité d'une décadence, sans pour autant fixer un délai de sortie de cette crise de notre civilisation. <br /> <br /> Il n'y a pas de raison qu'un retour d'une stabilité politique et économique, d'un plein emploi ou presque (3 à 4% de chômeurs), ne produise pas un retour de l'intérêt pour la culture, comme les précédentes périodes positives l'ont permis .<br /> <br /> L'histoire de l'activité artistique de l'homme montre son ancienneté, mais aussi sa fonction votive, son lien à la religion, une autre "nécessité" humaine, malmenée, ou dévoyée, par notre époque.<br /> <br /> Art et religion sont maintenant séparés. Les religions, anciennes ou nouvelles, ont pour fonction de colmater l'angoisse humaine, et non d'offrir des belles choses à la divinité susceptible.<br /> <br /> Remarquons encore que notre pensée magique, devenue impie, continue de donner le "la" au reste du monde.
Répondre
S
"ventre affamé n'a pas d'oreilles!"<br /> <br /> Mais ne pas oublier, aussi, que la majorité des classes moyennes et supérieures sont issues des paysans qui constituaient l'essentiel de la population française, avant l'institution de l'enseignement public, laïque et obligatoire, par Jules Ferry, au début de la IIIème république. Dès la seconde génération suivant cette ouverture au savoir, l'accès aux études supérieures a été possible. L'accès à la culture en a été facilité.<br /> <br /> La déviance de la culture contemporaine, vers la laideur provocatrice , concerne tous les amateurs non frappés de snobisme. <br /> <br /> Dans l'état actuel de notre société, inadaptée au mondialisme, la valeur ajoutée de la connaissance est une urgence sociale. Elle vaut mieux que le panem et circenses copié de l'empire romain décadent.
Répondre
S
Merci pour votre réponse. Il y aura toujours des ilots d'érudition dans les océans d'ignorance. Il y aura toujours des hommes et des femmes aimant l'étude. Mais pour la plupart, l'étude n'est que le chemin vers une profession, une place utile dans la société. Or, précisément, notre corps enseignant répugne à admettre cet aspect pragmatique du savoir, cet utilitarisme, oubliant que la connaissance ouvre à la liberté, au moins de penser.
Répondre
S
Je vous remercie de votre commentaire, très motivé. Je suis d'une génération et d'un milieu pour lesquels l'enseignement du latin de la sixième à la première allait de soi. En raison de la guerre une partie de mon parcours secondaire d'est passé dans un collège catholique, où l'enseignement du latin et du grec était à peu près général.<br /> <br /> Mais je n'ai jamais été convaincu de ce que cet enseignement me facilitait mon perfectionnement dans la langue française. J'ai davantage profité, pour ma propre langue, de l'étude du portugais, qui a la même syntaxe, et une grammaire très proche et, selon moi, bien mieux analysée et expliquée que ce qu'on fait en France.<br /> <br /> Malgré le déclin de l'enseignement du latin, il y a encore une production littéraire française de très bonne qualité, sans oublier la littérature française des pays francophones, et celle d'étrangers, qui par passion pour notre langue, écrivent leur oeuvre en français. Ils ne sont peut-être pas passés par l'étude du latin et du grec.<br /> <br /> L'offre de l'étude du latin et du grec doit être maintenue là où elle est demandée et possible. Elle devrait, par contre, être systématique pour les études littéraires du niveau universitaire. On peut tout apprendre à l'âge adulte, dès lors qu'on a de la passion pour ce qu'on apprend. Passion qui manque aux jeunes générations.<br /> <br /> La baisse du niveau moyen des jeunes français dans leur pratique du français a sûrement d'autres raisons que leur ignorance du latin.
Répondre
S
Dans l'état actuel, tant de l'offre, que de la demande, je ne vois pas de caractère indispensable à une offre dans tous les collèges, qui ne pourrait être de qualité égale. Je pense que la décision doit appartenir à l'équipe pédagogique et aux familles qui le demandent, éventuellement. <br /> <br /> Je ne suis pas convaincu de sa nécessité pour un meilleur accès à la langue française ou pour d'autres performances.<br /> <br /> Comme je l'ai rappelé dans mon billet, force est de constater que l'accès au professorat de latin (ou de grec ancien) est d'une difficulté décourageante. Ma fille, qui a fait du latin jusqu'en hypokhagne, y a renoncé, et a obtenu l'agrégation de lettres modernes.<br /> <br /> La science des langues anciennes ne disparaitrait pas nécessairement, mais se concentrerait au niveau universitaire.
Répondre
Sceptique
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité